Stories We tell. Le secret de Sarah.

Toute bonne famille a ses secrets! Super sujet et fil conducteur de l’essai documentaire Stories We Tell (Les histoires qu’on raconte) de Sarah Polley.

Mystère et non-dits planent chez les Polley autour des origines de la petite dernière qui ne ressemble pas du tout à son papa et qui de surcroît, est née avec la chevelure rousse!

Blague de famille qui deviendra persistante : Sarah serait-elle le fruit d’une aventure qu’aurait eu sa mère, disparue depuis plus de vingt ans, lors d’un séjour à Montréal alors qu’elle jouait dans une pièce de théâtre au Centaur ?

La cinéaste part à la recherche de la vérité. De sa vérité. Lequel des trois acteurs ayant partagé la scène avec sa mère à Montréal pourrait-être son père biologique?  Tom, Wayne ou Jeff ?

À tour de rôle, ses frères et sœurs, son père, ses tantes et tous ceux qui ont quelque chose à dire à propos de cette histoire seront invités à livrer LEUR perception de la vérité. Leurs témoignages en dit beaucoup sur les différentes interprétations possibles d’une même réalité. Un délice !

Je me suis intéressée à Sarah Polley pendant mes années passées à Toronto. Elle est pour les Ontariens, ce que serait un mixte de Charlotte Laurier et  Karine Vanasse pour les Québécois, X 10. Une star enfant talentueuse qui a fait ses débuts très tôt comme actrice au cinéma et à la télévision et qu’on a vu grandir à l’écran aux côtés des plus grands : Terry Gilliam, Atom Egoyan, David Cronenberg, Wim Wenders. J’ai toujours eu beaucoup d’admiration pour ses choix artistiques intelligents, des projets indépendants, audacieux voire même expérimentaux parfois.

À l’âge de 10 ans, on lui confie le rôle titre dans Road to Avonlea, une série télévisée canadienne de Disney Channel, dans laquelle elle incarne une petite fille orpheline de mère élevée par ses deux tantes. Le conte classique ! Série qui la rendra célèbre instantanément.

L’ironie du sort voudra qu’au moment de la diffusion de la série à la télévision, Sarah Polley sera frappée par la mort de sa propre mère, l’actrice et agente de casting Diane MacMillen-Polley. Femme charismatique, énigmatique, consumée par une vitalité explosive, qui quittera les siens beaucoup trop tôt, emportant avec elle tous ses secrets.

La réalisatrice nous présente un portrait magnifique de sa mère. Femme déterminée à être libre. Moderne. Un visage d’une infinie beauté, mais cachant une douleur vive. Celle d’avoir été séparée de ses deux enfants issus d’un premier mariage. Mariage malheureux, contrôlant et invivable qu’elle a choisi de quitter à une époque où une femme « respectable » ne quittait pas son mari pour un autre homme. Où un tel geste était condamné et puni. Puni sévèrement. La pire souffrance qu’on puisse infliger à une maman. Lui enlever la garde de ses enfants, peu importe les conséquences terribles sur eux. Épreuve qui l’aura fragilisée à jamais.

Plus le film avance et plus on prend conscience que la forme passe du documentaire à la fiction, puis de la fiction au documentaire. Que notre perception de l’histoire est habilement manipulée. C’est que Polley s’est amusée à juxtaposer de vraies images d’archives de famille tournées par son père avec sa caméra Super 8 à l’époque où sa mère était vivante, à de fausses images d’archives Super 8, tournées par la cinéaste, qui sont en fait des reconstitutions.

Puis, on comprend qu’on nous a sciemment entraînés vers une réflexion sur la mémoire, sur le montage du film de nos propres souvenirs que nous nous faisons tous inconsciemment, selon le portrait que nous voulons garder de notre histoire, selon la version de notre passé à laquelle nous voulons croire. Brillant !

Est-ce que Sarah découvrira qui est son père biologique ? Elle aura mis cinq ans pour nous raconter la version de son histoire à laquelle elle veut croire. Elle rend un hommage tendre et intime à sa famille et à ses parents.

Faut voir ce film. Un film que j’aurais voulu faire !

Encore en salle à Excentris à Montréal. En première à Québec samedi le 10 novembre au Cinéma Cartier, dans le cadre de sa sélection annuelle du Festival du Nouveau Cinéma. Au Clap dès le 16 novembre. 

Grand Prix Focus FNC 2012

M

Une réponse à “Stories We tell. Le secret de Sarah.

  1. Super. Toujours un grand talent pour l’écriture. Très intéressant

    Le 3 novembre 2012 20:27, « martine au cinéma »

Laisser un commentaire